- OPTO-ÉLECTRONIQUE
- OPTO-ÉLECTRONIQUEL’opto-électronique est un domaine dont la définition et les frontières peuvent être sensiblement différentes selon les écoles. La définition que nous adopterons ici consiste à désigner, sous ce terme, l’ensemble des processus dans lesquels des ondes optiques subissent des transformations analogues à celles qui sont susceptibles d’être obtenues par des courants électriques en électronique. En d’autres termes, il s’agit de méthodes permettant de véhiculer, de mémoriser et d’amplifier des signaux optiques par des moyens purement optiques. Comme les processus conduisant à la réalisation de mémoires optiques sont fondamentalement non linéaires, l’opto-électronique présente un grand recouvrement avec l’optique non linéaire. Par ailleurs, la transmission des ondes optiques se faisant le plus souvent à l’aide de structures guidées comme les fibres optiques, certains problèmes se rapprochent de ceux qu’on rencontre en télécommunication optique.La possibilité de véhiculer et de traiter un signal de façon purement optique peut présenter un certain nombre d’avantages par rapport aux possibilités offertes par l’électronique. Il est relativement facile d’obtenir et de faire se propager des impulsions lumineuses de durée très courte, de l’ordre de la picoseconde. Cette propriété, jointe à la possibilité théorique d’obtenir des mémoires optiques ayant des temps de commutation du même ordre de grandeur, pourrait se révéler intéressante pour la réalisation de systèmes très rapides. Par ailleurs, les ondes lumineuses ne sont pas sensibles aux champs électromagnétiques extérieurs, contrairement aux courants électroniques. Dans un environnement fortement perturbé, un système purement optique pourrait être plus digne de confiance qu’un système électronique. Notons enfin qu’une unité de logique optique doit occuper une surface dont la dimension caractéristique est de l’ordre de la longueur d’onde, ce qui, dans le domaine visible ou le proche infrarouge, permet d’envisager des densités de l’ordre de 107 unités par centimètre carré. Cependant, en dépit de ses avantages et dans l’état actuel des techniques, il semble que l’ordinateur optique ne puisse détrôner – dans un avenir proche – les systèmes électroniques. En revanche, pour certaines applications plus précises comme le transport d’informations au sein même de l’ordinateur ou le traitement d’images, l’optique pourrait se révéler compétitive avec l’électronique. Les systèmes étudiés actuellement ne seront pas décrits ici en détail, mais les mécanismes physiques qui sont à leur origine seront présentés ainsi que les analogies existant avec les circuits électroniques.Une autre définition plus restrictive de l’opto-électronique consiste à désigner sous ce nom l’ensemble des techniques permettant d’agir sur une onde optique à l’aide de dispositifs électroniques (modulateurs acousto-optique, électro-optique...).Effet Kerr optiqueLa plupart des systèmes étudiés en opto-électronique utilisent des matériaux optiques présentant un important effet Kerr optique. Cet effet se manifeste par le fait que l’indice du milieu dépend linéairement de l’intensité de l’onde qui traverse le milieu.Si nous considérons un atome interagissant avec une onde électromagnétique dont le champ électrique est つ cos( 諸t 漣 や . る 漣 﨏), tant que l’amplitude du champ reste suffisamment petite, le dipôle atomique ぽ (c’est-à-dire le produit de la charge du noyau par la distance moyenne entre noyau et électron) induit par ce champ lui est proportionnel. Au coefficient de proportionnalité entre ぽ et つ est associée la polarisabilité linéaire 見0 qui est directement reliée à l’indice du milieu. Quand l’amplitude du champ augmente, ぽ ne croît plus linéairement avec つ. Cet effet de saturation peut être associé, dans le cas d’un système atomique, au fait que la population du niveau inférieur de la transition diminue (au profit des niveaux excités) lorsque le champ électrique devient suffisamment intense. La relation entre ぽ et つ s’écrit alors:où 﨎0 est la permittivité du vide, I l’intensité de l’onde incidente (I = | つ |2) et 見2 la polarisabilité non linéaire d’ordre le plus bas. La relation (1) exprime que le dipôle électrique et le champ sont en phase. Une telle situation se produit lorsque la fréquence de l’onde incidente ne coïncide pas avec une fréquence de Bohr atomique: le milieu est alors purement dispersif et 見2I caractérise la saturation de la dispersion.Pour un milieu dilué contenant N atomes par unité de volume, l’indice de réfraction n est égal à:où:est l’indice linéaire et où:n 2I est la première correction à l’indice de réfraction due aux effets de saturation. Ce dernier terme, linéaire en intensité, est associé à l’effet Kerr optique.Milieu non linéaire dans un interféromètre de Fabry-PerotLes dispositifs de l’opto-électronique sont généralement constitués d’un milieu optique non linéaire et d’une boucle de réaction permettant, par exemple, de réinjecter dans le milieu une partie de la lumière qui l’a traversé. Le système le plus couramment étudié est l’interféromètre de Fabry-Perot.Supposons que l’on place un milieu dont l’indice varie linéairement avec l’intensité entre deux miroirs partiellement transparents (fig. 1a). La transmission 淪 de l’ensemble de l’interféromètre (c’est-à-dire le rapport entre l’intensité transmise It et l’intensité incidente Ii ) est maximale lorsque la distance L entre les deux miroirs est un multiple entier (p ) de la longueur d’onde de la lumière dans l’interféromètre (L = p). Lorsque L/ s’écarte légèrement de cette valeur entière, la transmission décroît (fig. 1b).Appelons 益 la fréquence du rayonnement incident. La longueur d’onde dans le milieu est égale à c/n 益, où c est la vitesse de la lumière et n l’indice donné par la formule (2). Il s’ensuit que L/ dépend de l’intensité I de la lumière dans l’interféromètre par la relation:L’intensité It à l’extérieur de l’interféromètre correspond à la fraction de l’intensité dans l’interféromètre transmise par le miroir de sortie. Si le miroir de sortie a un coefficient de transmission T, l’intensité transmise est donc égale à TI. En utilisant la relation It = TI, il est possible de remplacer dans la formule (3) la variable I par la variable It ou encore par la variable 淪 = It /Ii , ce qui donne:où nous avons posé0 = c /n 0 益. Ainsi, 淪 est une fonction de L/ à cause de la courbe de réponse de l’interféromètre (fig. 1b) mais, réciproquement, L/ est une fonction de 淪 à cause de la non-linéarité du milieu. Les points de fonctionnement (les solutions possibles pour 淪) du système vont donc être obtenus en cherchant graphiquement (ou numériquement) les intersections de ces deux fonctions. Suivant la valeur initiale de (L/0), différents types de comportement sont possibles, qui correspondent à diverses fonctions possibles de l’opto-électronique.Notons que la formule (4) décrit un comportement linéaire de (L/) en fonction de 淪; il s’ensuit que, dans les coordonnées de la figure 1, cette fonction est représentée par une droite, cette dernière étant pratiquement verticale pour de très faibles valeurs de l’intensité incidente.Considérons deux valeurs de (L/0) auxquelles sont associées les figures (2 a) et (2 c). La recherche des points de fonctionnement pour des valeurs croissantes de l’intensité incidente (I1 麗 I2 麗 I3 ...) permet de constater que, dans le cas de la figure 2 a, il n’y a qu’une seule solution pour toute valeur de Ii . La transmission 淪 croît d’abord progressivement avec l’intensité incidente avant de passer par un maximum et redécroître. Si la valeur de l’intensité transmise It = 淪Ii est portée en fonction de l’intensité incidente Ii , nous obtenons la courbe représentée sur la figure 2 b; elle se caractérise par un maximum de la pente pour Ii voisin de I2.Dans le cas de la figure 2 c, il n’y a qu’une seule solution pour de faibles valeurs de l’intensité incidente (Ii 麗 I 2), mais il est possible d’obtenir trois solutions pour des intensités moyennes (I 2 麗 Ii 麗 I 4) avant de retrouver une seule solution aux fortes intensités (Ii 礪 I 4). Il s’ensuit que la courbe (fig. 2 d) donnant les variations de It = 淪Ii en fonction de Ii est multivaluée dans une certaine plage d’intensité.Transistor optique et bistable optiqueLes courbes It = f (Ii ) obtenues dans le paragraphe précédent sont très semblables aux caractéristiques de certains systèmes électroniques. Il s’ensuit des analogies de fonctionnement et de comportement qui sont particulièrement claires dans deux cas: le transistor optique et le bistable optique.Considérons la situation de la figure 2 b et supposons que le faisceau incident ait l’intensité I2. Si nous superposons à ce faisceau un faisceau faible dont l’intensité dépend du temps, nous voyons que les variations d’intensité vont être considérablement amplifiées sur le faisceau transmis par suite de la forme de la courbe It = f (Ii ) au voisinage de Ii = I2. Un tel système, qui agit donc comme un amplificateur de lumière, a des propriétés qui l’apparentent au transistor. C’est pourquoi on lui donne le nom de transistor optique.Dans le cas de la figure 2 d, il est possible de montrer que la partie de la courbe représentée en pointillés correspond à des solutions instables. Néanmoins, pour toutes les valeurs de l’intensité incidente comprises entre I 2 et I 4, il y a deux solutions stables pour l’intensité transmise. C’est la raison pour laquelle un tel système est appelé bistable. La valeur effectivement obtenue pour l’intensité transmise dépend de l’histoire antérieure du système. Supposons qu’initialement l’intensité incidente soit très faible et qu’elle croisse progressivement, le système évoluera continûment sur la branche inférieure de la courbe de bistabilité jusqu’au moment où, ayant atteint le point extrême de cette courbe (M4 sur la figure 2 c, B sur la figure 2 d), il n’ait plus d’autre solution que de sauter sur la branche supérieure (N4 sur la figure 2 c, C sur la figure 2 d). Ensuite, quand l’intensité incidente diminue, le même argument de continuité montre que le système décrit la branche CD de la courbe (fig. 2 d) avant de sauter en A sur la branche inférieure de la courbe de bistabilité. Pour une intensité incidente voisine de I 3, l’intensité transmise peut donc prendre deux valeurs différentes (associées aux points P et P de la figure 2 d) selon les valeurs antérieures prises par l’intensité incidente. Un tel système se comporte donc comme une mémoire optique. Pour faire basculer la mémoire de P en P , il faut appliquer un créneau positif d’intensité, c’est-à-dire augmenter transitoirement l’intensité au-delà de I 4. En revanche, pour passer de P à P, il faut diminuer transitoirement l’intensité en deçà de I 2.Ainsi, il est possible d’obtenir théoriquement un transistor optique ou un bistable optique. En procédant à de petites modifications sur un tel système, d’autres fonctions (mise en forme d’impulsion, limitation d’intensité, portes logiques...) peuvent être obtenues.Le système considéré ici (milieu non linéaire placé entre deux miroirs) connaît diverses variantes. Par exemple, la non-linéarité du milieu peut provenir d’une saturation de l’absorption plutôt que d’une saturation de la dispersion. D’autres dispositifs, où la réaction de la lumière est assurée par un mécanisme différent de celui de la cavité Fabry-Perot, ont également été étudiés.Miroir à conjugaison de phaseLes miroirs à conjugaison de phase sont généralement étudiés dans le cadre de l’optique adaptative plutôt que dans celui de l’opto-électronique. En fait, la proche parenté existant au niveau des concepts et des milieux utilisés rend possible une utilisation à terme de miroirs à conjugaison de phase en opto-électronique. Les principales propriétés des miroirs à conjugaison de phase sont la rectification des fronts d’onde déformés lors de leur propagation dans un milieu inhomogène et la possibilité d’amplifier le rayonnement réfléchi.Considérons un milieu optique non linéaire interagissant avec deux ondes intenses:se propageant en sens opposé et une onde faible:[fig. 3]. Nous supposerons, pour simplifier, que ces trois ondes ont la même polarisation. La superposition de つ1 et つ crée une structure d’onde stationnaire avec une modulation de l’intensité dans la direction parallèle à ( や1 漣 や). Cette modulation d’intensité a pour conséquence une modulation spatiale de la saturation du milieu atomique considéré. Sous l’action des ondes つ et つ1, le milieu se présente donc comme un réseau modifiant la propagation de l’onde つ2. La diffraction de l’onde つ2 sur ce réseau conduit à la génération d’une onde つ se propageant dans la direction opposée à つ.Mathématiquement, dans l’expression de l’intensité I apparaissant dans le second membre de la formule (1), la modulation de l’intensité se traduit par l’existence d’un terme évoluant en 劉1 劉 cos[( や1 漣 や) . る 漣 﨏]. Ce terme, multiplié par la composante du champ évoluant en つ2 cos[ 諸t + ( や1 . る)], donne une composante du dipôle ぽ qui est proportionnel à 劉1 劉2 劉 et évoluant en cos[ 諸t + ( や . る) + 﨏]. Un tel dipôle génère donc une onde se propageant dans la direction opposée à celle de つ et dont la phase est opposée (on dit encore conjuguée) à la phase de l’onde incidente つ.Un miroir à conjugaison de phase renvoie donc un faisceau sur lui-même et transforme la phase 﨏 de l’onde en son opposé. Pour montrer une application potentielle de cette propriété, considérons une onde plane et un plan d’onde 﨏 = 0 (fig. 4 a). Si l’espace séparant ce plan d’onde du miroir à conjugaison de phase est rempli avec un milieu inhomogène (fig. 4 b), la surface d’onde sera déformée en arrivant sur le miroir à conjugaison de phase. C’est-à-dire que la phase 﨏 sera une fonction du point. Après réflexion sur le miroir à conjugaison de phase (fig. 4 c), la phase de l’onde est changée en son opposée (face=F0019 漣 﨏) et chaque rayon réfléchi suit un chemin identique à celui du rayon incident; de sorte que la phase accumulée dans cette propagation retour jusqu’au plan P est exactement égale à 﨏. Il y a donc compensation entre ces deux termes de phase. Dans le plan P, le faisceau réfléchi apparaît donc comme une onde plane tout comme l’onde incidente. Une telle propriété ne pourrait être obtenue à l’aide d’un miroir normal puisque, dans ce cas, le déphasage 﨏 serait doublé au lieu d’être compensé. Pour rendre intuitive cette possibilité qu’a un faisceau réfléchi de retrouver exactement au retour les mêmes caractéristiques que le faisceau incident, on dit parfois que le miroir à conjugaison de phase a une action analogue à un renversement du sens du temps.L’énergie émise dans l’onde réfléchie est prélevée sur les ondes intenses つ1 et つ2. Cette énergie peut donc être bien plus grande que l’énergie de l’onde incidente, ce qui signifie que le coefficient de réflexion d’un miroir à conjugaison de phase peut être beaucoup plus grand que 100 p. 100. Un tel miroir permet donc également l’amplification du faisceau réfléchi.PerspectivesTous les systèmes mentionnés précédemment (transistor et bistable optique, miroir à conjugaison de phase...) ont fait l’objet de nombreuses démonstrations de principe. Cependant, leur développement dépend de l’amélioration des matériaux. Il faut, en effet, trouver des milieux ayant des temps de réponse rapides, présentant une non-linéarité forte et pouvant, le cas échéant, être facilement miniaturisés. Même si les recherches en ce domaine débouchaient sur des avancées significatives, il ne faut pas s’attendre à court terme à une révolution d’ampleur comparable à celle qui a été due aux transistors. Il existe, en effet, des limitations fondamentales pour les systèmes optiques qui, par exemple, entraînent que l’énergie nécessaire à la commutation d’un bistable optique reste toujours plus grande que l’énergie nécessaire à la même fonction dans un dispositif à jonction Josephson, ensemble de deux supraconducteurs séparés par un isolant [cf. SUPRACONDUCTIVITÉ]. En fait, il semble que l’opto-électronique ne puisse être vraiment concurrentielle avec des dispositifs plus classiques que sur certains créneaux bien définis – par exemple multiplexage (possibilité de transmettre quasi simultanément plusieurs informations sur le même câble ou la même fibre) et démultiplexage rapide (possibilité de séparer plusieurs informations), traitement parallèle de l’information, fonctionnement dans un champ électromagnétique extérieur intense...
Encyclopédie Universelle. 2012.